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Halal, une histoire bien de chez nous


le syndrome du jeune coq


Alors que les exégètes de l’islam s’évertuent depuis des siècles à scruter les textes religieux pour établir les règles du licite et de l’illicite en matière alimentaire, certains de nos élus,  agriculteurs  et entrepreneurs français auraient trouvé réponse à la question.  C’est très simple, nous, en Bretagne, « nous disposons d’une expertise historique (du halal)”.  (propos de la société Doux, volailler, cité par un journaliste dans le Télégramme, cf lien ci-dessous).  Nous avions déjà tenté de commercialiser le kiwi des Landes, à défaut de Nouvelle Zélande, voici le halal de Bretagne comme l’artichaut ou le chou-fleur, une histoire bien de chez nous.

Heureusement, des  journalistes d’investigation, qui enquêtent dans les bureaux (sic) des producteurs, dénoncent depuis quelques temps un manque de transparence sur le marché halal. Comme ce matin dans le Télégramme où l’on ne rigole plus:  le halal a un “sérieux” manque de transparence…

(Le Télégramme du 11 octobre 2010;  Halal. Un sérieux manque de transparence http://www.letelegramme.com/ig/generales/regions/bretagne/halal-un-serieux-manque-de-transparence-11-10-2010-1078043.php)

Et pour en convaincre le lecteur, le journaliste n’a pas hésité à aller jusqu’à Marseille chercher la “vraie” norme halal… chez Asidcom. L’Association de Sensibilisation, d’Information et de Défense de Consommateurs Musulmans est plus modestement, un blogueur vétérinaire marseillais efficace et zélé comme les nouveaux convertis dans son combat contre l’”assommage” (que l’on désigne dans les abattoirs par étourdissement, qui consiste le plus souvent en l’utilisation d’un courant électrique pour provoquer une perte de conscience et de sensibilité de l’animal) et les méthodes industrielles d’abattage.  Que l’étourdissement ait obtenu l’aval d’autorités religieuses musulmanes dès le début de la création du marché halal ( et notamment une fatwa d’Al-Azhar); qu’il soit employé majoritairement dans le production halal au Royaume Uni, en Allemagne, en Espagne, en Nouvelle Zélande et en Australie;   que l’abattage halal n’ait jamais été autre qu’un abattage industrialisé, peu importe. Asidcom est contre l’assommage car “l’Islam” est contre (évidemment c’est plus simple comme ça). Qu’aucun référentiel halal n’ait obtenu un consensus religieux simplement parce que la question est complexe, que les religieux ont manifestement peu d’éléments solides pour statuer compte tenu des avancées scientifiques et technologiques, et que leur tâche soit compliquée par un concept créé par l’industrie, aujourd’hui très médiatisé qui les a laissé loin derrière ; M. Asidcom, et dans la foulée.. notre journaliste,  n’en ont cure. Le halal c’est pas étourdi et pis c’est comme çà. Donc voici DD, muni des critères du bon certificateur empruntés à Monsieur Asidcom, qui va faire ses enquêtes chez Doux lequel est certifié par l’AFCAI. Et de réaliser  son enquête :  si le producteur ne répond pas tout juste au trois critères d’asidcom  : « utilisez-vous l’électronarcose ou étourdissement de l’animal par un choc électrique? Les volailles sont-elles tuées mécaniquement? Et enfin, les sacrificateurs peuvent-ils réciter la prière traditionnelle? », alors paf, il a faux. Et Doux a eu faux.  Mais un journaliste d’investigation a le souci de l’équilibre- ou bien il craint de se faire tirer les oreilles par la direction du journal,  car mieux vaut ne pas rigoler avec les poids lourds volaillers en Bretagne traditionnelle[1]– il donne donc la parole à un copain de la défense, un autre groupe volailler par la voix de Daniel Sauvaget, PDG de TillySabco, lequel assure que « tous les préceptes du Coran sont respectés » dans ses abattoirs (tous ? peuchère même notre marseillais n’en demandait pas tant) et « si ça n’était pas le cas», assure-t-il sans rire «de nombreux salariés, musulmans, se seraient indignés ».  Le problème c’est qu’avec le taux de chômage dans le coin et particulièrement dans les familles musulmanes, l’indignation ne sert à rien, et elle ne fait pas manger. Mais surtout, ultime argument de Monsieur le PDG, dont on se délectera j’en suis sûre ici : «L’AFCAI la société a été créée par des universitaires qui n’ont pas l’habitude de communiquer». Bon ben il suffisait de le dire… voilà qui est fait (pour les universitaires du moins). Un journaliste transformé en contrôleur halal, muni d’un guide pioché sur internet à la recherche du vrai halal,  une histoire bien de chez nous.

NB: le même scénario se répète avec la diffusion sur Canal + de l’émission « Spécial investigation » le même jour  qui met en scène  deux vertueux journalistes munis de vérité religieuse – et du même guide de l’enquêteur asidcom de Marseille –  contre des firmes cyniques qui trompent des “musulmans” sans défenses.  Mais sur Canal les journalistes ne donnent pas la parole à la défense. Cette réponse, on la trouve dans le Figaro du même jour signée par une autre journaliste qui dénonce la partialité de ses confrères qui affirme-t-elle s’appuieraient sur une norme “fondamentaliste”.

IL n’y a pas de norme fondamentaliste, parce qu’il n’y a pas de norme halal du tout. En plus la journaliste du Figaro utilisent mes paroles dans son argumentaire pour appuyer une interprétation avec laquelle je suis en désaccord 🙁

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